29 Mai 2025
Rawdon, le 20 mai 2025
L’industrie forestière québécoise est souvent présentée comme un pilier de la transition écologique. Or, les données partagées par Michel Surprenant, secrétaire d’Éco-corridor lanaudois, ex-maire de Chertsey et titulaire de deux maîtrises dont une en gestion municipale de l’environnement, lors de la conférence Les vérités interdites sur la foresterie tenue à Rawdon le 8 mai dernier, révèlent une tout autre réalité.
Selon M. Surprenant, jusqu’à 69 % du volume des arbres abattus seraient laissés à la décomposition ou transformés en résidus industriels, générant ainsi une quantité importante de CO₂. Ces émissions seraient possiblement comparables à celles du secteur des transports au Québec. Par ailleurs, chaque arbre mature abattu ne peut plus remplir son rôle de puits de carbone. Un seul arbre absorbe environ 25 kg de CO₂ par an. Avec 200 000 hectares de forêts coupés chaque année, notre capacité d’absorption est amputée de plusieurs millions de tonnes.
Ce déficit ne sera compensé qu’au bout de 20 ans, une fois les arbres replantés arrivés à maturité. Et encore : les jeunes plantations, souvent des monocultures, ne remplacent ni les fonctions écologiques ni la biodiversité des forêts anciennes.
Malgré tout cela, les émissions liées à l’industrie forestière ne sont pas comptabilisées dans le bilan officiel du Québec, qui ne prend en compte que les émissions liées aux combustibles fossiles (96 millions de tonnes par an). Ce fossé méthodologique crée un angle mort préoccupant dans nos politiques climatiques.
À Éco-corridor lanaudois, nous ne remettons pas en question l’existence d’une industrie forestière, mais nous posons une question simple : comment peut-on prétendre atteindre la carboneutralité sans tenir compte des impacts réels de nos pratiques forestières ? Où sont les données officielles sur le carbone forestier, la biodiversité perdue, ou les effets cumulatifs des coupes industrielles ? La transparence, la rigueur scientifique et l’adaptation des pratiques doivent devenir la norme.
Le 9 mai, le rapport 2025 de la Commissaire au développement durable est venu confirmer ces préoccupations. On y apprend que le Québec ne protège actuellement que 4 % de son territoire de manière permanente, loin de l’objectif de 30 % d’ici 2030. Pire encore, la planification forestière actuelle n’intègre ni le carbone forestier, ni de stratégie climatique. Et la Commissaire elle-même n’a pas été consultée avant le dépôt du récent projet de loi forestier.
Il est urgent de revoir nos priorités. Comme l’a souligné M. Surprenant, il ne nous reste que quelques années pour inverser la tendance climatique. Son appel à créer un groupe citoyen axé sur le Bonheur intérieur brut dans la région de la Matawinie est un pas vers une réflexion locale et durable.
La forêt est bien plus qu’une ressource : c’est un bien commun, un refuge pour la biodiversité et un acteur silencieux de notre avenir climatique. Elle ne peut pas parler. À nous de le faire.
Éco-corridor lanaudois
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